Expérience client
Dans le retail, le rebond est plus digital que jamais

La pandémie a temporairement mis un terme à la progression du retail. Les acheteurs, habitués à faire leurs achats en ligne, seront exigeants sur l'expérience qu’ils vivront en magasin. Plus que les prix ou les produits, c’est l’expérience qui dictera le succès ou l'échec des lieux physiques.

Aux États-Unis comme en Europe, la réouverture des magasins se fait à pas comptés, et sous l’œil vigilant des autorités de contrôle : les directives du Center for Disease Control y couvrent un champ très large. Mais une chose est claire : dans le point de vente post-covid, la technologie prend une place désormais prépondérante : l’affichage numérique constitue un outil idéal pour communiquer autour de l'engagement du magasin à l'égard des mesures de sécurité, pour accompagner et guider les clients ou pour mesurer précisément les pics de fréquentation.

Mais au-delà de sa capacité à prévenir les risques sanitaires, le digital offre de formidables perspectives de développement pour un secteur du retail particulièrement traumatisé outre-Atlantique. Revue de détails des principales innovations en la matière.

La publicité affinitaire s’invite en magasin

Selon MarketsandMarkets, le marché de l’affichage numérique devrait atteindre les 27.8 milliards de $ en 2026. Quant aux publicités utilisant ce canal de diffusion, elles augmentent la visibilité du message de 400% par rapport aux publicités classiques selon Microserve.

Pour John Furner, President et CEO de Walmart U.S, la publicité digitale et l’outil digital en général « crée de la valeur pour les clients. Cela crée de la valeur pour les vendeurs. Cela crée de la valeur pour les fournisseurs. Et c'est une source de revenus qui est possible grâce aux relations numériques que nous entretenons avec les clients. »

Un impact majeur sur le chiffre d’affaires

Macy’s a annoncé avoir généré 35 millions de dollars de ventes de médias numériques en ligne et en magasin depuis leur lancement en août. Permettre à de nouveaux modèles de publicité d'atteindre les acheteurs et d'encourager les achats a été l'objectif de nombreux grands détaillants, notamment Walmart, Target, Walgreen's, CVS et bien d'autres.

Walmart enregistre une croissance de 69% du commerce électronique au quatrième trimestre 2020 et 120 millions d'acheteurs uniques sur le site Walmart.com chaque mois. Pour aider à tirer parti de cette opportunité, Walmart a lancé un vaste programme de publicités destinées aux vendeurs. Ces derniers peuvent en effet acheter de la publicité sur Walmart Connect (le Walmart Media Network rebaptisé).

Elles seront non seulement actives sur le site mais aussi dans les magasins, sur les écrans digitaux, domaine dans lequel Amazon ne peut pas rivaliser.

Connectivité : les promesses de la 5G

Walgreen a annoncé le lancement de la 5G dans 9 000 de ses magasins pour alimenter les écrans, les robots et les expériences numériques in situ.
2021 sera certainement l’année où la 5G deviendra réalité et les retailers seront poussés à tenter de nouvelles expériences digitales pour attirer les clients en magasin.
Les déploiements vont entraîner une explosion des applications et une plus grande rapidité de communication.
De même, IDC prédit que les étagères intelligentes interactives, les robots et les systèmes IoT mis à jour augmenteront la demande de 10x d'ici 2025.

Quand le point de vente devient diffuseur d’événements

Le live streaming prend de plus en plus d’ampleur et si l’outil permet de connecter l’acheteur en ligne au magasin physique, il peut servir aussi d’outil de commercialisation in situ. Le Live streaming d'événements a sans doute un bel avenir.
BeautyCounter a ainsi annoncé l’ouverture de son studio de production de Live Streaming dans son magasin de Los Angeles.
Après les porte-paroles de marques et les micro-influenceurs, 2021 sera l'année où le magasin deviendra un créateur médiatique incontournable et grâce aux nombreux écrans digitaux disponibles en magasin un diffuseur puissant.

« Nous verrons plus de diffusion en direct depuis les magasins en 2021, car les détaillants chercheront à s'engager plus profondément avec les clients et à offrir de nouvelles expériences d'achat personnelles » , prédit Maxine Clark, fondatrice et ancienne PDG de Build-A-Bear Workshop.
L'Interactive Advertising Bureau (IAB) a récemment prédit que les ventes générées par Livestream devraient doubler pour atteindre 120 milliards de dollars dans le monde en 2021, comme en témoigne le récent accord Walmart Livestream avec TikTok.

Le paiement fait sa révolution

Après une année difficile marquée par les fermetures de magasins et une baisse des commandes, les marques et leurs enseignes explorent de nouvelles façons d'attirer les plus jeunes. L’une des solutions retenues : explorer de nouveaux outils de paiements adaptés à la crise sanitaire et économique. Leurs usages vont probablement transformer durablement l'expérience client en magasin post covid.

Paiement mobile : cap sur le sans contact !

L'étude de Visa 2020 Back to Business a révélé que 78% des consommateurs dans le monde ont changé leurs méthodes de paiement pour réduire les contacts, tandis que 67% des petites entreprises ont adopté de nouvelles technologies de paiement pour maintenir leur activité. Le paiement mobile en magasin est donc un outil qui est appelé à perdurer puisqu’il a su s’adapter et permet de répondre aux attentes des consommateurs.

« La COVID-19 provoque la baisse de l’usage des liquidités plus rapidement que ce que les projections les plus optimistes prévoyaient », indique le rapport. « Les liquidités ont été utilisées pour 20,5% du volume mondial des points de vente en 2020, soit une réduction de 32,1% par rapport à 2019. » À l'avenir, FIS (une des sociétés leaders dans l’innovation du secteur de la finance) affirme que 52% des achats en ligne seront effectués avec un portefeuille numérique. Selon le rapport, il s'agit déjà du principal moyen de paiement en ligne en France, en Allemagne, en Russie, en Espagne et au Royaume-Uni et son utilisation a augmenté de 60% en Amérique du Nord l'année dernière.

Selon Patrick Gauthier, vice-président d’Amazon Pay, interviewé récemment par PYMNTS : « Ce que les entreprises constatent maintenant, c'est l'importance d'être particulièrement adaptables. Le numérique leur donne la capacité d'accéder à l'innovation, peut-être d'une manière à laquelle elles n'avaient pas pensé auparavant. Et nous considérons que l’une de nos missions est d’apporter ces innovations à nos revendeurs, notamment dans le domaine du paiement. »

BNPL : la maison fait crédit

Avec l’option « acheter maintenant, payer plus tard », ou BNPL, des magasins comme Macy's, Gap et Neiman Marcus relancent le paiement à crédit. La pandémie a laissé des millions de consommateurs au chômage et dans une situation financière très difficile. Les Américains avaient besoin d'une plus grande flexibilité dans leurs achats. Buy Now Pay Later était la solution parfaite. Le BNPL n’est pas réglementé comme les instruments de crédit, d'où sa popularité dans l'utilisation et la distribution.
La jeune génération d'utilisateurs aux États-Unis a commencé à utiliser le BNPL pour éviter de payer des frais ou des intérêts sur les cartes de crédit. Des acteurs comme Klarna, Affirm, Afterpay, Quadpay et PayPal permettent à leurs clients de faire des achats en ligne ou en magasin sans avoir à payer immédiatement. Effet principal : la valeur moyenne des commandes est généralement plus élevée et les conversions à la caisse augmentent de 30% pour les détaillants utilisant BNPL.

Selon Kaleido Intelligence, une société de conseil en fintech, d'ici 2025, 680 milliards de dollars seront dépensés en utilisant ePOS finance / Buy Now Pay Later (BNPL).

Mais l’utilisation du BNPL présente certaines limites. Selon une étude de Credit Karma, près de 40% des consommateurs américains qui ont utilisé «acheter maintenant, payer plus tard» ont manqué plus d'une échéance, et 72% de ces consommateurs ont vu leur score de crédit diminuer. Non seulement BNPL peut vous inciter à faire des achats inutiles mais les paiements manqués entraînent de lourdes pénalités : le taux d'intérêt peut monter en flèche si le solde n’est pas payé à temps.

Cette tendance devrait néanmoins s’installer, car elle est favorable à la relance du commerce durant la crise et encourage l’achat en magasin ou en ligne.

Un terminal de paiement à la portée de tous

Le paiement est traditionnellement une étape complexe au terme du parcours client, et les innovations se multiplient pour simplifier et accélérer le passage en caisse. Aux Etats-Unis, la société Square, créée par Jack Dorsey, le patron de Twitter, a pris une longueur d’avance. La startup met en place un écosystème commercial complet en intégrant des services à valeur ajoutée pour compléter ses solutions de paiement sur les canaux physiques et en ligne. Elle est présente dans presque tous les secteurs du commerce.

L’énorme avantage de Square par rapport à ses concurrents réside dans sa simplicité : le petit commerçant qui n’acceptait auparavant que le paiement en espèces peut désormais proposer un paiement par carte bancaire sans avoir à investir dans un équipement lourd et contraignant. En France, d’autres solutions novatrices font leur apparition, comme le Kiosk de Samsung ou les outils de MPos (Mobile Point of Sale), qui permettent aux magasins d’offrir à leurs clients des outils à la fois simples et parfaitement sécurisés pour fluidifier leur passage.

Une application mobile au service des transactions

Venmo est une fintech qui a été rachetée par PayPal. Elle permet de faire des paiements entre n’importe quel individu utilisant l’application mobile. Venmo est un des grands vainqueurs de la pandémie, car l’application peut être utilisée par de nombreux professionnels qui auparavant n'acceptaient que le paiement en espèces ou qui ne souhaitent pas investir dans des machines pour leur encaissement.
La chaîne de magasins CVS vient d’annoncer accepter les paiements par Venmo. En arrivant en caisse, le client n’aura qu'à scanner un Qr Code qui l’enverra vers son compte Venmo afin de payer le montant de la facture demandée par le magasin.

Plus aucun contact physique et une réelle simplicité d’installation.
Durant le deuxième trimestre, Venmo a annoncé avoir augmenté de 52% le montant des versements effectués pour un total de 37 milliards de $, par rapport à l'année précédente.

4 concepts qui font leur grand retour

Le magasin n’est pas mort, bien au contraire. En un an, les marques ont eu le temps d’imaginer des solutions pour attirer de nouveau leurs clients sur leurs points de vente. Et à ce petit jeu de la réinvention de l’expérience, force est de constater que l’on n’assiste pas à une révolution en matière de stratégie : c’est bien en remettant au goût du jour des concepts « anciens » que les enseignes les plus novatrices créent la différence.

Shop in shop

Première de ces tendances qui connaissent un nouveau souffle : les bons vieux corners ! Target a ainsi annoncé de nombreux partenariats avec Disney, Ulta Beauty, Levi’s et de nombreuses marques DNVB dont il vend leurs produits en exclusivité.

Dans le même esprit, Nordstrom a signé un partenariat avec la marque d’équipements sportifs à domicile Tonal et a triplé le nombre d'emplacements physiques dans lesquels les appareils de la marque sont vendus.

Mini Stores

La chaîne de grands magasins Macy’s est convaincue que seuls les meilleurs malls vont survivre. « Nous continuons de croire que les meilleurs centres commerciaux du pays prospéreront », a déclaré le PDG Jeff Gennette aux analystes financiers. "Cependant, nous savons également que Macy's et Bloomingdale's ont un potentiel élevé hors des malls et dans des formats plus petits."

La chaîne de grands magasins prévoit donc de tester plusieurs petits magasins Macy’s en dehors des centres commerciaux. Ils ne sont pas les seuls : Target, Best Buy proposent des formats de magasins plus petits tout en déployant leurs efforts dans le e-commerce.

Dans certains magasins Best Buy, la surface commerciale a même été réduite par deux pour ne proposer que les produits les plus populaires. Un catalogue plus complet reste stocké dans les magasins et peut donc être disponible à l'achat.

Dans certains magasins, Best Buy teste également un hub pour la Geek Squad, une équipe d'employés qui installent et mettent en place des technologies et effectuent des réparations. En résulte des magasins plus petits mais dans lesquels le client trouvera les produits phares et davantage de services.

Drive Through

Le dernier grand boom de la restauration en “Drive Through” remonte aux années 1970. Le prochain pourrait se produire dans les années 2020. En réaction à la pandémie, Starbucks, Chipotle, Taco Bell et Shake Shack font partie des chaînes qui prévoient de se concentrer sur le développement de ce type de restaurants dans les mois à venir
Les dirigeants du secteur affirment que les consommateurs recherchent un accès sans contact à leurs restaurants préférés et le drive-through devient une véritable aubaine pour les chaînes de restauration rapide telles que McDonald's et Wendy's.

Shake Shack prévoit de créer sa propre version du service au volant l'an prochain, avec une voie réservée aux commandes sur place et une autre à la récupération des commandes numériques : la « Shack Tracks ».

La restauration n’est pas le seul secteur à développer ce service. Wawa, la chaîne de magasins de proximité, a déclaré récemment qu'elle ouvrira son premier “drive through” en janvier dans le New Jersey.

A noter : ces espaces de restauration en drive through seront largement équipés d'écrans pour passer les commandes.

Curated Stores

La démarche de curation en magasin a de beaux jours devant elle. Naked Retail en est le parfait exemple. Cette marque possède deux magasins à New York, avec toutes sortes de marques DTC branchées comme Pangaia et Lele Sadoughi. Leur sélection privilégie la qualité plutôt que la quantité. Ce concept ancien s’inspire également de la méthode Netflix. La curation de marque qui a connu un bel essor au temps du magasin “This Is Story”, est en passe de devenir une stratégie commerciale majeure. De plus en plus de consommateurs apprécient cette démarche car elle leur permet d’échapper à un nombre écrasant de choix. Avantages de la marque : gain de temps et d'argent et plus de possibilités de créativité.

En général, la meilleure curation est observée chez les petites enseignes. Leurs créneaux d’ouverture et leur espace physique limité, les obligent à être sélectives dans ce qu'elles proposent à leurs clients. Elles préfèrent en général leur fournir une sélection multi-marque plutôt que d'être associée à une marque spécifique.

L'une des entreprises américaines les plus remarquée pour sa curation est Williams-Sonoma, un vendeur d’équipements ménagers pour la cuisine notamment. A ses débuts, le fondateur Chuck Williams voulait distribuer des outils spécialisés aux chefs américains. Dans une démarche de curation classique, il n'essayait pas de proposer un catalogue exhaustif mais juste les articles qu'il jugeait les meilleurs.